mercredi 10 décembre 2008

HOMMAGE A MESSIAEN: un arc-en-ciel de musique


"Aimez-vous Messiaen?"

A cette question qu'aurait pu poser Françoise Sagan, l'on pourrait répondre qu'on ne peut aimer que ce que l'on connaît.

Qu'à cela ne tienne, Odile Thiériot, directrice de Théâtre en Dracénie, a eu le courage de proposer en cette veille du 100e anniversaire de la naissance du compositeur avignonais, une soirée entière pour le découvrir ou le re-découvrir.

Pour ce faire, elle a convié Marie-Christine Forget, musicologue et directrice du Conservatoire de Draguignan pour une présentation du musicien et tout particulièrement une introduction à son Quatuor pour la Fin du Temps, qui allait faire la première partie du concert qui suivait.

Mêlant avec le talent qu'on lui connaît l'humour et la culture, Marie-Christine Forget nous a donc parlé de ce compositeur méconnu et dont l'oeuvre recèle pourtant bien des trésors, à l'image de ce Quatuor, composé en captivité en 1940 à la frontière germano-polonaise. On retrouve ainsi la spiritualité bien connue d'Olivier Messiaen à travers une symbolique très forte et la représentation musicale de moments de l'Apocalypse de Saint Jean, associées à une passion pour l'ornithologie, à travers des imitations de chants d'oiseaux au violon ou encore à la clarinette.

Olivier Messiaen disait lui-même ceci à propos de son quatuor : "lorsque j'étais prisonnier, l'absence de nourriture me donnait des rêves colorés: je voyais l'arc-en-ciel de l'Ange, et d'étranges tournoiements de couleurs. Mais le choix de "l'Ange qui annonce la fin du Temps " repose sur des raisons beaucoup plus graves ... Au nom de l'Apocalypse, on a reproché à mon œuvre son calme et son dépouillement. Mes détracteurs oublient que l'Apocalypse ne contient pas que des monstres et des cataclysmes : on y trouve aussi des silences d'adoration et de merveilleuses visions de paix. De plus, je n'ai jamais eu l'intention de faire une Apocalypse : je suis parti d'une figure aimée (celle de "l'Ange qui annonce la fin du Temps"), et j'ai écrit un Quatuor pour les instruments (et instrumentistes) que j'avais sous la main, à savoir : un violon, une clarinette, un violoncelle, un piano ... Dernière remarque. Mon Quatuor comporte huit mouvements. Pourquoi ? Sept est le nombre parfait, la création de six jours sanctifiée par le sabbat divin; le sept de ce repos se prolonge dans l'éternité et devient le huit de la lumière indéfectible, de l'inaltérable paix."

Et comme de la théorie à la pratique, il n'y a qu'un pas, la soirée s'est poursuivie du Théâtre Lily Pons au Grand Théâtre pour le concert, avec une première partie -le Quatuor pour la Fin du Temps- interprétée de mains de maîtres par trois de nos professeurs, Anne-Marie Lamotte au piano aussi puissant qu'éthéré, Jacques Tempesti à la clarinette (magnifique Abîme des Oiseaux, d'une difficulté redoutable) et Pierre Bensaïd au violon (sublime Louange à l'Eternité de Jésus).

Le concert s'est alors conclu avec l'ensemble marseillais Musicatreize dirigé par Roland Hayrabédian (Victoire de la Musique 2007, Prix Olivier Messiaen...) qui, avec une technique impressionnante, a remarquablement mis en valeur le parallèle entre la musique chorale d'Olivier Messiaen (les Cinq Rechants) et le Printemps, du compositeur du XVIe siècle Claude Lejeune. Un passionant pont entre deux rives, entre deux époques.

Un nouvel arc-en-ciel pour un bien bel hommage.

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